Calendrier de l’avent de l’accessibilité numérique 2024 : La représentation du handicap dans la pop culture (partie 1 sur 3)

Le , par Marie Le Borgne - Accessibilité

Temps de lecture estimé : 11 minutes.

Pour la fin de l’année 2024, je me suis lancée un défi : créer un calendrier de l’Avent dédié à l’accessibilité et aux personnes handicapées. Chaque jour, il met en avant un handicap, relié à une référence pop culture (film ou série), accompagné de conseils pratiques pour rendre l’expérience numérique plus inclusive.

Un réel défi pour moi : non seulement le handicap n’est pas beaucoup représenté dans la pop culture, mais en plus je ne suis pas une grande cinéphile. 

Dans chaque choix j’ai également essayé de privilégier les acteurs et actrices qui ont un handicap, mais également que le handicap ne soit pas la représentation principale de la série ou du film. 

L’idée était de montrer des représentations naturelles, comme dans la vie quotidienne : ni super-pouvoirs, ni fatalité, juste un handicap intégré dans une histoire, sans en être le sujet principal.

Après avoir fini ce calendrier, le constat est confirmé : le handicap n’est que très peu représenté dans notre pop culture. Mais surtout, lorsqu’il est représenté, il l’est dans des stéréotypes : 

  • les handicaps psy sont dans les films d’horreurs
  • les déficiences intellectuelles sont représentées via la trisomie 21
  • les maladies chroniques sont toutes une fatalité 
  • les troubles du spectre autistique ne sont représentés que via l’autisme à haut niveau de fonctionnement
  • les handicap sensoriels (vue et ouïe) sont représentés comme un super pouvoir ou sont moqués

Bien heureusement, il y a quelques exemples où des personnes handicapées sont simples voisines ou collègues, dont le handicap est connu lors d’un échange banal et puis c’est tout. Ou encore, où le personnage principal a un handicap, mais ce n’est pas plus un sujet que ça et son entourage sait s’adapter à son handicap, sans qu’il y ait besoin de le rappeler. 

Des séries et films plus récents essaient d’aborder correctement le handicap, et j’espère qu’on va en voir de plus en plus. Ensemble, ces représentations pourraient aider à construire une société plus inclusive, où les personnes handicapées sont simplement intégrées.

Afin d’être plus digeste, cet article été découpé en 3 parties :

Sommaire :

Jour 1 - Le TDAH (trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité)

Une série que j’ai découverte bien trop tard est « The Office » (version américaine). Un des personnages principaux, Michael Scott, peut être un exemple de personne ayant un TDAH (non déclaré dans la série).

Il présente plusieurs comportements caractéristiques de ce trouble cognitif de part son inattention, impulsivité et parfois même hyperactivité. 

Impact du TDAH sur l’expérience numérique

Les personnes ayant un TDAH peuvent rencontrer des difficultés de concentration, particulièrement dans des environnements numériques où les distractions sont nombreuses.

Améliorer l’accessibilité pour une personne avec un TDAH

  • Éviter les contenus en lecture automatique, comme les vidéos, animations ou sons. Ces éléments perturbent la concentration.
  • Permettre la mise en pause des animations et vidéos. La possibilité de contrôler les médias permet de choisir si l’on souhaite ou non avoir une animation.
  • Limiter les contenus dynamiques ou inattendus, tels que des pop-ups ou des alertes automatiques, qui peuvent créer une surcharge cognitive.

Jour 2 - Les troubles de la mémoire

Si je vous parle d’un personnage ayant des troubles de la mémoire dans le dessin animé « Le monde de Nemo », beaucoup vont rapidement penser à Dory ! Ce poisson bleu qui accompagne Nemo et qui a de sévères troubles de la mémoire immédiate.

En autre référence, le personnage de Nilin du jeu vidéo « Remember Me » m’avait été cité.

Impact des troubles de la mémoire sur l’expérience numérique

Les troubles de la mémoire peuvent rendre difficile de suivre les étapes d’un processus ou comprendre ce qui est attendu dans la complétion de formulaires.

Améliorer l’accessibilité pour une personne avec des troubles de la mémoire

  • Avoir des intitulés de formulaire toujours visible, pour avoir un rappel de ce qui est en train d’être complété.
  • Clarifier le nombre d’étapes d’un formulaire et le nom de l’étape en cours, afin de suivre le parcours sans avoir recours à sa mémoire.
  • Mettre en place l’autocomplétion dans les formulaires, cela permet de ne pas avoir à chercher des informations et un gain de temps important pour les personnes avec des troubles de la mémoire.

Jour 3 - Troubles de l’anxiété

Chidi Anagonye dans la série « The Good Place » présente des troubles de l’anxiété très élevés créés par la difficulté de faire des choix, tout en assurant la bonne éthique de ces derniers. Il est régulièrement mis dans des dilemmes moraux qui ne font qu’augmenter son anxiété.

Impact des troubles de l’anxiété sur l’expérience numérique

Les personnes souffrant de troubles de l’anxiété peuvent se sentir accablées par des pages surchargées d’informations, d’animations ou d’alertes. Elles peuvent également ressentir de l’angoisse face au risque d’erreur lié à une incompréhension des consignes.

Améliorer l’accessibilité pour une personne avec des troubles de l’anxiété

  • Préférer un design épuré avec des infos visuellement hiérarchisées, afin de ne pas laisser la place aux doutes.
  • Ajouter des messages de confirmation pour des actions critiques (par exemple la suppression d’éléments), pour rassurer les personnes naviguant sur votre site.
  • Permettre des échanges asynchrones, éviter de proposer que des appels ou des chats en direct qui peuvent être source d’angoisses pour certaines personnes, mais des échanges par mail par exemple ou messageries.

Jour 4 - La malvoyance (légère à modérée)

Dans les séries et films « Marvel », un personnage récurrent est Nick Fury. Suite à une mission du Shield il perd l’usage d’un œil et dévient borgne. De par mon nom de famille j’ai rapidement pensé aux borgnes, mais j’ai également eu beaucoup de mal à trouver une représentation de personne malvoyante, ou alors plusieurs représentation de personnes avec une forte myopie (souvent dans un cadre humoristique).

Impact de la malvoyance légère à modérée sur l’expérience numérique

Les personnes malvoyantes vont utiliser des assistances technologiques comme des mises en pages différentes ou des outils de zoom. Si leurs assistances technologies ne fonctionnent pas sur un support numérique par manque d’accessibilité de ce dernier, cela représentera un obstacle très impactant dans leur usage du numérique.

Améliorer l’accessibilité pour une personne malvoyante

  • Rendre accessible vos documents PDF ou préférez les documents Word (qui sont aussi à rendre accessible).
  • Assurer des contrastes de couleurs suffisants (ratio de 4,5:1 pour le texte et de 3:1 pour des éléments graphiques et informatifs), pour que chaque information soit visible par le plus de personnes possible.
  • Regrouper visuellement les informations qui vont ensemble, par exemple une étiquette doit être accolée à son champ de formulaire, pour que le lien entre ces informations soit évident lorsqu’un fort zoom est utilisé.

Ça a été difficile de me limiter à 3 conseils, il y en a d’autres qui viendront sur les prochains jours. Concernant l’accessibilité des documents, c’est un sujet en soi, qui est souvent bien trop oublié.

Jour 5 - Les Troubles Musculo Squelettique (TMS)

En regardant de nouveau la série « Dr House », j’ai pu revoir un épisode où Gregory House, le personnage principal se déplaçant à l’aide d’une canne, a des TMS au niveau de l’épaule dû à l’utilisation excessive de sa canne non adaptée. Il doit donc utiliser une canne adaptée pour soulager les douleurs et éviter d’empirer les TMS. Si vous connaissez le personnage, vous vous doutez bien que l’adaptation n’a duré qu’une partie de l’épisode…

Impact des TMS sur l’expérience numérique

Suivant les TMS l’utilisation des outils numériques ordinaires n’est pas possible, surtout sur une durée répétée. Le temps passé sur un parcours ou une expérience doit donc être simplifié et utilisable par toute adaptation nécessaire pour la personne concernée.

Améliorer l’accessibilité pour une personne avec des TMS

  • Toutes interactions à la souris sont faisables au clavier seul.
  • Les zones interactives ont une taille minimale (24 par 24 pixels), cela évite l’erreur de clic sur un élément à côté de celui souhaité.
  • Mettre en place une navigation claire et logique : minimisant les étapes nécessaires pour atteindre une action pour éviter la fatigabilité ou d’intensifier la douleur que les personnes peuvent avoir avec certains TMS.

Jour 6 - Le daltonisme

Avec près de 8% de la population masculine, j’aurais cru que trouver un personnage daltonien allait être d’une facilité déconcertante. Et bien non, mais grâce à internet j’ai pu trouver Dwayne Hoover du film « Little Miss Sunshine », un ado qui apprend son daltonisme lors d’un test d’Ishihara qui lui apprend l’impossibilité de réaliser son rêve : être pilote.

Impact du daltonisme sur l’expérience numérique

Toutes informations qui seront basées uniquement sur de la couleur, sera un frein pour les personnes daltoniennes. Par exemple mettre en rouge les champs en erreur d’un formulaire ou différencier des lignes d’un graphique que par un changement de couleur.

Améliorer l’accessibilité pour une personne daltonienne

Ici un seul conseil : ne pas donner d’informations uniquement par la couleur. Il faut donc s’assurer, qu’en plus de la couleur, une autre différenciation est possible (un mot différent, une forme différente, …). Cela en va de vos mails, le fameux « tu trouveras mes réponses en rouge » qui est à proscrire. Préférez écrire vos réponses dans votre réponse au mail plutôt que dans le mail reçu.

Jour 7 - L’épilepsie

Lily O’Connor dans le film « Electricity ». Lily est épileptique et a régulièrement de fortes crises d’épilepsie qui lui provoquent des hallucinations permettant d’avoir des indices pour retrouver son frère disparue.

Impact de l’épilepsie sur l’expérience numérique

Suivant le niveau de sensibilité de l’épilepsie de chaque personne concernée, tout élément présentant des flashs présente un risque de créer une crise d’épilepsie. Une personne épileptique ne sait donc jamais à quoi s’attendre lorsqu’elle va sur un site ou lorsqu’elle lance une vidéo.

Améliorer l’accessibilité pour une personne épileptique

  • Ne pas mettre d’effets de flash sur son site ou dans une vidéo. S’il y en a, mettre un message d’avertissement avant que les flashs se produisent (au début de la vidéo par exemple).
  • Permettre la mise en pause de tous contenus en mouvement, pour éviter de risquer un effet de flash non désiré.
  • Éviter les contenus vidéos en lecture automatique, encore plus si ces derniers contiennent des effets de flash.

Réussir à trouver une référence à été très difficile (outre des personnages secondaires dans des séries médicales). Le film n’a pas l’air d’être très connu, mais il a le mérite d’exister et il permet de présenter ce handicap.

Jour 8 - La déficience intellectuelle

Suivant votre génération vous avez peut être vu et revu les épisodes de « Code Quantum », où le personnage principal Sam Beckett se retrouve dans une spirale temporelle et passe d’époque en époque en se transmutant dans différentes vies. À deux reprises, il se transmute dans Jimmy Lamotta, un homme trisomique.

Impact de la déficience intellectuelle sur l’expérience numérique

Tout ce qui va complexifier une navigation va être un obstacle supplémentaire pour ces personnes, des langages complexes, l’ambiguïté de l’information, un compte à rebours pour effectuer une action, sont autant d’éléments pouvant présenter un obstacle pour les personnes avec une déficience intellectuelle.

Améliorer l’accessibilité pour une personne déficiente intellectuelle

  • Utiliser du langage simple voir mettre en place le Facile à Lire et à Comprendre (FALC), afin d’assurer la compréhension de vos contenus pour tout le monde.
  • Rendre claire et non ambigüe les intitulés de boutons ou liens (on arrête le « cliquer ici » ou un simple « valider » pour un formulaire si cela n’est pas clair sur la fonction du bouton).
  • Permettre de mettre en pause les comptes à rebours ou de le masquer afin de ne pas perturber la navigation.

On peut facilement voir que ce sont des conseils déjà donnés pour d’autres handicaps. C’est l’avantage et l’importance de l’accessibilité : une recommandation ou un critère mis en place sera utile pour des handicaps différents et des besoins différents. C’est pas beau ça ?

À suivre

La suite de cette série :